• Qui néglige les marques de l'amitié finit par en perdre le sentiment... William SHAKESPEARE

     

     

    Je suis convaincue que l'amitié est bien plus complexe que l'amour... Sans doute parce que j'y suis plus sensible et plus exigeante...

    Je suis lente en amitié... Je m'enflamme souvent pour tout et n'importe quoi... Les voyages, les lieux, la mode,  je me cherche, je suis infidèle, je butine...

    Mais pour les sentiments, je suis lente...Très très lente... Bien sur, il y a la première rencontre, j'aime ou je n'aime pas... Il n'y a pas de session de rattrapage, je me trompe rarement sur ma première impression...

    Alors j'ai des copains et des copines... Ce mot qui finalement ne désigne que des relations superficielles et surtout faciles... Non dénuées d'affects mais sans profondeur et surtout, essentiel pour moi, sans souffrance...

     

    Pour l'étape de l'amitié, la vraie, à la vie, à la mort... Celle que ni les malheurs, ni les bonheurs n'entament, il me faut du temps, beaucoup de temps... Il y faut de la patience, voire de l'opiniatreté... Car pour que je laisse tomber la muraille, il faut trouver la brêche et elle est fort bien gardée...

     

    Mes quelques amis le sont depuis plus de 10 ans, ils ont partagé les joies et les peines de ma vie d'adulte... Ils font partie de MA famille, celle que je me suis créée...

     

    Et puis au milieu,  il y a une étape intermèdiaire... Celle du purgatoire... La case probatoire... Là où, peut-être (comme on trempe un orteil dans l'eau que l'on sait glaciale), je pourrais envisager de faire confiance à l'autre, à l'aimer peut-être un peu plus qu'il ne serait raisonnable pour moi... Et c'est là, que je prends conscience de mes failles, de ma difficulté à lâcher... à ne plus être sur la réserve ou sur la défensive... de ma difficulté à faire confiance, à accepter l'autre avec ses forces et ses faiblesses...A la moindre alerte, je fuis totalement, lâchement, sans regard en arrière, uniquement guidée par la peur de souffrir...

     

    Alors quand j'aime, je le fais totalement, sans retenue, sans jugement...

     

    Mais quand je n'aime plus, (jamais sans raison), je le fais aussi sans demi-mesure... L'"autre", le "désaimé" sort de ma vie bien plus vite qu'il n'y était rentré... Avec la violence de l'indifférence... Parce que j'ai remis l'armure de protection et que je l'ai doublée...

     

    Souvent, je me fais peur de tant d'intransigeance, de cette difficulté à donner ma confiance...

     

    Mais finalement et à mon grand désarroi, j'adhère souvent au postulat de Sartre:

     

    "L'Enfer, c'est les autres"...

     

    Sûrement parce que je choisis la facilité...


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  • Il est parfois des situations où l'inertie peut être LA solution... Parce que je ne suis pas la Fée Clochette (je me tue à vous le répéter!)... Parce qu'assister n'est pas aider... Parce qu'on ne sauve pas les gens malgré eux... Parce qu'on n'apprend QUE de ses erreurs... Parce que la maturité passe par l'acceptation de l'autonomie...

     

    Mais je travaille dans un service de "jusqu'auboutistes"... L'echec, la mort, les désillusions, les obstacles; ils ne veulent pas connaitre... Dans un sens, c'est plutôt rassurant de savoir que tout sera fait pour sauver le patient... Qu'il bénéficiera des meilleurs soins et même d'un peu d'humanité...

     

    Mais ce ne sont pas toujours ceux qui donnent l'impression de se battre le plus qui le font réellement... Mais surtout, l'humanisme c'est essentiel mais l'affectif parasite vite l'évaluation...

     

    Alors quand un docteur se met à hurler que "le service social ne fait JAMAIS rien" parce que la solution proposée ne le satisfait pas... J'ai juste envie de lui tordre le cou... Et lui conseiller d'aller répondre à ses messages qui l'attendent par centaine sur son bureau plutôt que de me dicter mon boulot... Mais quand il me dit que "Si je renvoie le patient dans ses îles, je vais le tuer"... Là, je lui signale, qu'au point où il en est, il n'a qu'à l'héberger chez lui!

     

    Même super chef est fachée... Contre lui... Bien sur...

     

    Bon, je vous brosse le tableau quand même...

     

    Un très jeune homme, arrivé des îles, suivi pour une pathologie chronique et fluctuante mais qui laisse vivre normalement entre les crises...

    Une formation avec hébergement en attente...

    Son domicile chez sa mère un peu loin...

    Une soeur célib' chargée de famille qu'il a épuisée...

    Un frère lui-même en hébergement formation...

     

    Sortant de l'hôpital... Qui, je vous le rappelle en passant, n'est pas un hôtel... Surtout qu'aux alentours de 1500 euros la journée (même si c'est de la pension complète) tu peux espérer mieux comme décors...

     

    Le jeune ayant refusé toutes les solutions proposées, y compris le contrat jeune mmajeur de l'ASE... Il reste les foyers d'hébergement d'urgence... C'est loin d'être une solution idéale ni même acceptable... Mais c'est la seule qu'il accepte... Alors, bien sur, on se dit, qu'il ne se rend pas compte, qu'il va se faire dépouiller en 24h, voir des horreurs et prendre peur... Mais si cela peut lui permettre de prendre conscience qu'il n'a pas 10000 solutions et qu'il va falloir faire un compromis... Pourquoi pas?

     

    Et forcément le DOC' est contre MES solutions... Il propose............................ la conval. pendant 6 mois!!

     

    Bien sur! Reste plus qu'à trouver le motif médical... Mais cela ne me concerne pas...


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  • En passant par la Charente maritime...

     

    Voila 2 années que nous découvrons Royan et ses alentours... Enfant, si j'y allée mais les souvenirs teintés de mélancolie sur fond de violences ne m'incitaient pas à y retourner...

     

    Mais voila, la marraine de mon fils est une amoureuse de la région et y a fait l'aquisition d'une résidence secondaire... Nous y sommes donc allés un WE puis une semaine entière et puis 3 semaines (quand on aime on ne compte pas!)... Et puis nos amis ont choisi de partir vers des cieux plus cléments (encore que...) et nous nous sommes occupés de la maison...

     

    Nous revenons donc d'une petite semaine là-bas...

     

    Et je ne m'en lasse pas... Je ne me lasse pas de l'océan... De la douceur du climat... Des activités variées et des petits restos...

     

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    Cet été, on y retourne, cette fois en gite avec piscine...


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  • Ben non...

     

    Il est évident qu'il faut aimer son prochain un minimum... Etre capable d'empathie... Enfin, avoir de l'intêret pour les autres et ce qui ce passe autour de toi...

     

    Mais il faut aussi avoir la capacité de "mise à distance"... Etre capable d'aider l'autre sans souffrir avec lui... Le comprendre sans "se mettre à sa place"...

     

    Tout est question d'équilibre en service social... Parce que finalement, si on y regarde de plus près, les clients du service social sont juste des personnes qui ont perdu le leur et qu'il faudra aider à le retrouver...

    C'est le grain de sable qui fait dérailler la machine et l'AS qui va aider à l'enlever... Ou bien à vivre avec... Pour acquérir un nouvel équilibre...

     

    Le souci, c'est que souvent, nous sommes plus sensibles à la souffrance d'autrui parce que nous-mêmes l'avons connue... N'importe quelle souffrance... MAIS pas toutes les souffrances... Juste la notion de souffrance morale...

    (Et attention, je n'écris pas qu'il faut avoir été une femme battue pour comprendre les femmes battues!)

     

    Résultat: quand je regarde autour de moi, assez rares sont les AS pour qui la vie n'a été que fleurs et bonheurs... D'où l'expression: on est pas AS par hasard... (ben non y'a un concours!)

     

    Cependant, pour pouvoir exercer ce métier sans se mettre en danger (et les autres par la même occasion), il faut avoir dépassé nos douleurs, nos petits ou grands drames... Il faut être capable de relativiser sans minimiser... Comprendre que quelque soit la valeur de la douleur de l'Autre dans notre échelle de souffrance, elle existe et elle lui appartient... Humblement, il faut apprendre le Non-jugement...

     

    Et souvent, c'est difficile... Difficile de mettre de côté ce qui nous semble minime ou important pour comprendre simplement pour notre "client", "patient", "assuré" (appelez le comme vous voudrez...) et ce qui lui parait essentiel à LUI!

     

    D'où l'intérêt d'être bien dans ses converses, escarpins, ballerines, crocs ou ce que vous mettrez... M'en fous! Ce sont VOS pieds...

     

    Mais déjà qu'il est parfois complexe (et pas gagné d'avance), du fait de notre histoire personnelle d'être à l'aise avec chaque "aidé" que l'on rencontre... Je vous laisse imaginer les joies et les difficultés du travail en équipe...

    Parce que, si on est pas là pas hasard, c'est parce que nous avons sorti la tête de l'eau pour éviter la noyade... Donc nous sommes des "winneuses"... Voire des "Killeuses", pour celles qui ont suivi Freud et tué père et mère (psychiquement hein!!)...

     

    Donc imaginez une équipe d'AS... Et bien souvent, grâce au vernis (avec un top coat dessus bien épais...) de l'éducation et de la formation, ça passe... Mais parfois, ça casse... ça explose... Que dis-je? A côté Thernobyl (on peut pas plaisanter avec le Japon c'est trop frais), c'est rien...

     

    Parce que les clients, on veut bien leur passer beaucoup de choses, z'ont le droit d'être impatients, agressifs, difficiles... On peut expliquer pourquoi ils sont comme ça... Et puis même, on va les envoyer voir la psy pour déméler tout ça... Parce qu'on est vraiment TRES gentilles...

     

    Mais les collégues, c'est une autre histoire... Et moi, j'avoue, je n'ai pas de patience... Et l'histoire non digérée de la collégue... Honnêtement... Si elle me gène pour faire mon boulot, je suis sans pitié, ni empathie, ni RIEN DU TOUT...


     

    Parce que finalement, quand on travaille avec de l'humain en perte d'équilibre... Pour le faire remonter sur le fil, il faut être funambule et surtout travailler avec une équipe de funambules... Et quand un membre de l'équipe refuse de remonter sur le fil, le fil tangue et moi j'ai le vertige...

     

     

     


     



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  • Aujourd'hui, alors que j'étais partie à la recherche d'un de mes patients...

    Pas de panique, je ne suis pas bordélique à ce point, je ne les perds pas... Il ne se sauvent pas (pas facile de courir avec un tube de trachéo)... et normalement, je suis informée des décès... Donc mon patient avait juste déménagé...

     

     

    Je me suis arrêtée pour en saluer un autre...

     

    Ce vieux monsieur, je l'avais entendu hurler hier, je m'étais arrêtée, il en voulait à la terre entière... A l'interne qui lui faisait peur (cela dit...), à sa femme (qui ne l'emmenait pas ailleurs), à sa famille, et à d'autres (mais je n'ai pas tout compris)... Il venait de nous être transféré d'un autre service et devait y retourner...

     

    Cet après-midi, il était avec son épouse... Je les ai salués... Et puis il m'a expliqué qu'il avait peur... Que le service de réanimation était le dernier endroit où l'on passait...

     

    Alors j'ai plaisanté un peu... Ben oui, si on en sort pas vivant, pourquoi les docteurs me font-ils faire des demandes de rééducation?? Pour m'occuper??? (j'm'ennuie pas!)  Pour m'embêter??? (hum ça...) Parce que les patients vont mieux??? (je préfére ça!)...

     

    Son épouse m'a expliqué... Expliqué que son mari avait peur, peur de mourir, peur de "traîner" 3 mois en réa comme son frère qui lui, y était mort...

    Elle m'a expliqué sa propre souffrance, celle de voir son époux dans ce lit, affaibli, amaigri, de devoir le nourrir comme un nouveau-né (il était si fort...), de ses cris d'hier quand il l'avait renvoyée, elle, leurs enfants... "Vous comprenez", m'a-t'elle dit, "nous sommes mariés depuis 58 ans et nous ne nous sommes jamais disputés!"...

    Et puis elle s'est de nouveau tournée vers lui, l'a rassuré, lui a dit qu'elle resterait auprès de lui, le sommant de manger sa compote pour partir en convalescence parce que: "Je ne suis jamais allée à l'hôtel mais là, je pars un mois avec lui en convalescence!"...
    Elle était belle cette vieille dame, souriante, maquillée et apprêtée malgré sa détresse... Pleine d'espoir...

     

    Je les ai laissés à leur intimité (toute relative en réa), laissant mon adresse dans le service... Au cas où... La dame m'a répondu: "C'est déjà beaucoup de m'avoir écoutée"... Le monsieur lui a dit: "Elle est gentille, ELLE"... (comprenez: elle ne me touche pas! donc ne me fait pas mal!)

     

    Je suis sortie, sur la pointe des pieds, admirant cet amour sans faille...

     

     

    Chutttttt


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